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Le clairon intergalactique

NUMÉRO SPÉCIAL — Fleronce Prima, 8e rotation de la 4 e phase, Année Trisextile, Ère courante

Les auteurs des Aventures de la Princesse Izha-Ba en entrevue exclusive avec Le Clairon Intergalactique

Votre courageuse publication vous offre une entrevue en catimini avec les auteurs de la BD « Le temple des dieux fous – Une aventure de la Princesse Izha-Ba », François Brisson et Luc Chamberland.

Le Clairon Intergalactique : Comment avez-vous eu accès aux récits de la princesse déchue?

François Brisson : Simplement à partir de nos conversations avec Zarky, l’ingénieur poète de ce trio.

Luc Chamberland : Oui, nous rencontrons semi-régulièrement Zarky dans des restaurants gastronomiques avec des gueuletons bien arrosés. Il aime la bonne bouffe, comme nous d’ailleurs, et c’est un très bon raconteur qui sait bien embellir leurs épreuves.

FB : Nous précisons des détails et vérifions toujours pour être le plus authentique possible sur le déroulement des évènements, Luc n’accepte aucune imprécision.

LC : …et François n’en laisse pas passer une. C’est peut-être inégalitaire, deux interrogateurs pour un seul témoin, mais Zarky aime avoir un auditoire. On doit parfois subir la récitation de quelques-uns de ses poèmes… dont celui sur les muffins aux herbes brûlés. Vous voulez l’entendre?

LCI : Euh non… une autre fois peut-être. La princesse vous offre des confidences?

LC : Malin, vous voulez savoir où elle se trouve ? Vous le savez très bien, elle est en exil et introuvable; on se fie aux bons mots de Zarky. D’ailleurs…

FB : …la Princesse Izha-Ba adore voir ses aventures en bandes dessinées. Comme vous le savez nous avons déjà plusieurs albums qui ont vite été épuisés. Elle en est ravie, a confiance en notre traitement des récits et, tout compte fait, nous laisse carte blanche.

LCI : Comment travaillez-vous les livres?

FB : Le plus fidèlement et le plus authentiquement possible en rapport aux évènements rapportés par Zarky.

LC : Le scénario se construit à deux. Chaque page, chaque case sont discutées pour avoir une lecture facile du récit. Il faut toujours se surprendre l’un et l’autre. On lance les idées comme une joute amicale de ping-pong où il y a action, humour et suspense enjoué.

FB : Le plus amusant est de sans cesse nous peinturer dans un coin. Il est primordial d’y trouver du plaisir, de l’enthousiasme à chaque étape.

LC : Justement dit. Il nous faut créer quelque chose que nous aimerions lire nous-mêmes. On rigole juste à se raconter l’histoire.

LCI : Vous avez des étapes précises de travail?

LC : On travaille à la veille école avec des feuilles de papier; on écrit, on réécrit, on fait beaucoup de bonhommes allumettes, on rature… Le tout est un brouillon détaillé du récit.

FB : Parfois on jette des parties entières qui font fausse route. C’est seulement quand nous sommes satisfaits de ce premier jet que j’entame un premier découpage très rapide du livre au complet et on le regarde ensemble. De plus on travaille différents récits à la fois, question d’ajouter au besoin des éléments qui feront des rappels.

LC : Oui, un regard constant pour améliorer sans cesse la mise en scène, un peu comme un « storyboard » – scénarimage – d’un film d’animation qui est en pleine évolution pour bien équilibrer l’histoire. Les personnages nous parlent et font des choses inattendues.

FB : Oui, ils sont vivants et ont une tête bien à eux et nous imposent leurs humeurs…

LC : Nous sommes à la fois au service des personnages et au service de l’histoire.

LCI : Vous arrivez à trouver une harmonie dans cette façon de travailler à deux cerveaux?

FB : On n’est pas là pour se prendre la tête, au contraire. On doit rigoler dans ces projets.

LC : Il y a une saine atmosphère de détente. La pression de mener l’histoire dans la mauvaise direction est éliminée, chacun est le garde-fou de l’autre, donc le délire des idées peut débouler sans restriction.

FB : Ho, il y a UNE restriction: ne pas s’ennuyer !

LCI : Il y a clairement une complicité entre vous. Comment vous êtes-vous rencontrés?

FB : Comment ?  Où ?  Quand ? En sixiè­me année, très jeunes, nous étions dans la même classe, mais on ne se fréquentait pas, restant chacun dans son coin. Puis il y a eu un concours de BD dans la classe. Si je me souviens bien, presque tous ont participé. J’ai gagné la médaille d’argent pour la deuxième meilleure BD alors que Luc a remporté, lui, la médaille d’or. Nous avons commencé à nous parler à ce moment-là. La BD de Luc était vraiment impressionnante.

LC : La BD de François était aussi très réussie !… C’est quand même un drôle d’âge: l’enfance n’est pas terminée, l’adolescence n’est même pas un concept et les garçons veulent tous agir en adulte mais avec les avantages de l’enfance. Lire de la bande dessinée étant une activité considérée enfantine, ceux qui continuaient à lire de la BD ne l’avouaient à personne, de peur d’être ridiculisé de passer pour un bébé lala. C’était rafraichissant de rencontrer un autre camarade de classe intéressé par la BD et sans s’en rendre compte, on est devenus le soutien l’un de l’autre.

FB : Un peu ça oui. Moi, je lisais Tintin et Astérix et commençais un peu à lire les BDs Marvel traduits en français aux Éditions Héritage, mais c’était à peu près tout. Cependant, Luc était un avide lecteur et un « nerd » avant l’heure. Chez lui, il y avait beaucoup de BD du catalogue de Spirou. Il en était presque un peu fou, il parlait des auteurs des scénarios, des dessinateurs… Il aimait bien démontrer son savoir. Parler de BD, ça n’intéressait vraiment personne, sauf moi. Naturellement on en parlait comme d’autres parlent de hockey toute la journée.

LC : À part s’échanger nos BDs, on regar­dait souvent ensemble la télévision, beaucoup de séries japonaises : Marine Boy, Mini- Fée, Speedracer, Le roi Léo, Princesse Saphir. C’était toujours des aventures invraisemblables cousues de fil blanc, Ha! Ha! Ha! Parlant de fils, il y avait surtout les séries en Supermarionation de Gerry et Sylvia  Anderson : Supercar, Fusée XL5, Escadrille sous-marine et Les sentinelles de l’air. Il y a aussi Sol et Gobelet, ce truc absurde… Tout ça a été d’une grande influence sur nos goûts et nos couleurs…

FB : Le sublime Voyage au fond des mers, Au pays des géants, Les envahisseurs… On adorait le ridicule des histoires. On savait que ça n’avait pas d’allure, que c’était arrangé avec le gars  des vues, mais on ne boudait pas notre plaisir !

LC : C’est un peu pas mal ce genre de joie que nous essayons de recréer, ce désir et ce plaisir d’enfant qui ne nous ont jamais quittés en faisant ces BD.

LCI : Désolé, le temps file, il ne faut  pas laisser les scrutateurs censeurs du royaume découvrir nos positions. On se retrouve bientôt pour la suite.

À suivre…